Raymond Tillmann nous a quittés par un jour de novembre, le moins propice à l’aviation de plaisance ! ( 1927-2011)
Garçon modeste en paroles, mais combien riche en vraies heures de vol, en expérience aéronautique de toute sorte .
En 1945 , les restrictions du temps de guerre n’étant pas levées, le seul moyen pour les jeunes futurs pilotes d’apprendre à piloter consistait à s’assoit sur une planche et un dossier en bois dur en posant les pieds sur une barre de bois pivotante autour d’une grosse vis, le palonnier, et à serrer dans ses mains un authentique manche à balai garanti « Grellor » relié à des câbles de fil de fer qui permettaient au grand gouvernail de donner la direction !
Pour décoller, ce « planeur « lourd s’accrochait à un câble de 300 mètres qui s’enroulait autour d’un gros cylindre mû par le moteur crachotant d’une vieille guimbarde pour laquelle on avait déniché un peu de combustible. Il fallait éviter que le moteur cale au moment de la traction pour la santé du jeune homme !
Les temps de vol se comptaient en secondes et plus d’une minute en l’air était déjà un exploit sur ce « Zöglin » .bon apprentissage pour un futur pilote !
Finalement, Raymond a pu perfectionner ses aptitudes avec un Piper L-4 « Family ».
ECOLE D’AVIATION 1947/1949
Le 17 juille t 1947, la recrue d’aviation RTillmann se trouve à Payerne un long temps de plusieurs semaines pour apprendre à cirer les chaussures militaires sur les semelles après trempage dans la fontaine et accessoirement à tirer au mousqueton 31.
Puis c’est enfin MAGADINO !
Première semaine : apprentissage et pliage de parachutes !
Puis enfin après toute une grosse compresse de théories, c’est la merveille : le Bücker 131 « Jungmann » en double commande : 13 heures ? Pas mal du tout
Enfin, le lâcher en solo, d’abord les 106 CH du Jungmann, puis ô merveille ! les 160CH du 133
« Jungmeister » avec pour finir une vingtaine d’heures sur le très moderne Pilatus P-2 : train
rentrant, pas variable, 465 CH :un vrai chasseur !
Enfin, lâcher sur le « petit » MORANE D-3800 860 CH. Tirs au canon, aux mitrailleuses.
Entré en juillet 1947 à l’école d’aviation il en ressort fin 1949 avec ses « ailes », fier comme Artaban caporal à la compagnie d’aviation 6.



ESCADRILLE AVIATION 3
Dès juillet 1949, cours d’entrainement et vols en formation sur le Morane D-3801 1040 CH (Hispano HS-51), Raymond ou plutôt TILO volera sur cette monture jusqu’au début 1951.
ESCADRILLE AVIATION 6
C’est à l’escadrille 6 que TILO transitera sur le DH-100 « Vampire « du 30 avril au 12 mai 1951.
Le 1 er mai : prise en mains du Vampire !
Mais avant, i1 fallait faire un stage sur la planeur VLM servant ù habituer les futurs pilotes de jet au train tricycle avec « rien » devant , pas de gros moteur . Assez drôle ! Il n’y avait alors pas de Vampire-Trainer.
La transition se passe plutôt bien et bientôt toute l’escadrille vole sur sa nouvelle monture. Monture plutôt difficile à quitter envol, car il n’y a pas encore de siège éjectable et les procédures de sortie sont dignes d’un acrobate de cirque !
Les atterrissages et décollages se succèdent et l’avion est bientôt maîtrisé.
Après un passage d’une année à l’escadrille 6 sur le Vampire, Raymond rejoint enfin la « 5 » le l e r novembre 1952.

LA CINQUIEME
La « cinquième escadrille « sous le commandement du docteur Glatt vole alors le Vampire et notre fraîchement émoulu Adjudant s’intègre bien dans cette escadrille de « foutus welches à la
discipline particulière » .
Lors d’un cours à Payerne, l’aérodrome est sévèrement bombardé et la piste principale est hors d’usage, il faut décoller sur les pistes de roulement ou même une fois carrément par le travers
( direction Halle 5 ) sur une bande moitié dur moitié gazon délimitée par deux lignes de rectangles jaunes : le train d’atterrissage est vraiment costaud !
Raymond effectuera plus de 200 heures sur MORANE et 635 sur VAMPIRE.
LE HUNTER
Lorsqu’en 1958, le facétieux nouveau ri patron « reprend les commandes de l’escadrille des mains du bon docteur , pour Tilo c’est une bonne chose. En haut Eeu, il est décidé que la première escadrille de miliGe à être équipée de la nouvelle monture sera la cinquième.
C’est bien justice, car le P-51 MUSTANG avraiment été réservé aux Suisses-Allemands et c’est là un des grands regrets de Tilo : de ne pas l’avoir volé.
Donc , fin juillet 1959 l’escadrille aii complet prend en mains le HUNTER sous le commandement de Roger Uldry.
Fin, racé, élégant, véritable « avion de pilote », cette nouvelle bête surprend et enchante tous les pilotes.
Après deux semaines à Emmen sous un ciel maussade, l’escadrille ne maîtrise pas trop mal la nouvelle bête, à part quelques incidents ayant provoqué plus de peur que de mal.
Lorsque les cours doubles ont lieu sur la base de guerre de Rarogiie, quelques atterrissages très braqués démontrent l’utilité de la petite roulette de queue. La piste est courte !
Redmond n’y échappe pas et même une fois l’angle un peu trop prononcé occasionne une
« cabosse ».


Après plus de onze années à l’escadrille5 et encore 328 heures de vol su HUNTER , Tilo quitte l’escadrille de front pour le corps de remorquage où il volera dix ans au profil de la DCA.
Avec presque une centaine d’heures de vol sur les C-3603 et 05 pour le remorquage de saucisses, il aura 1’occasion de se familiariser avec le VAMPIRE-TRAINER et d’effectuer une centaine d’heures sur VENOM pour les vols de pointage.
Sa carrière militaire se termine à fin 1974 à quarante-huit ans et 1700 heures de vol militaires.

Parallèlement et principalement , Raymond travaillait comme pilote professionnel à l’OFFICE FEDERAL DE L’AIR ( Actuellement OFAC ).La part essentielle de son cahier des charges consistait à effectuer des vols de calibration au profil de la navigation aérienne en Suisse et aussi à l’étranger.
Dans cette carrière bien remplie, il a piloté seize types d’avions différents allant de CESSNA -172 au LEARJET passant par le DC-3 et toute une catégorie de bimoteurs plus ou moins surprenants.
Mais ses avions de travail :
Le BEECHCRAFT C 18/ C-45
Le DE HAVILLAND DH-104 « DOVE « Le GRUMAN « GULFSREAM «
Ont porté toute sa carrière de « pro »
360 heures de vol, 2’165 heures
:1’176 heures,
Sou›•ent par des temps exécrables, venteux et avec plafonds variables et traîtres, Raymond a imperturbablement et avec grande maitrise rempli ses tâches avec courage et application, sans accidents notables.
Après plus de 3800 heures de vol civil et à bientôt cinquante ans, notre ami et camarade a rendu son manche à balai avec sagesse et point d’amertume.
Plus de 5’500 heures de vol au tableau et des vraies heures de vol sans pilote automatique, sans l’instrumentation sophistiquée actuelle qui permettent aux pilotes de ligne de lire le journal et de pincer les fesses du personnel féminin.
N’oublions pas qu’à cette époque le GPS était inconnu comme la TV au début du vingtième siècle
Modesteinent, sans prétentions, sans la moindre forfanterie, Redmond in’exp1iquait ses vols simplement me donnant des détails techniques que j’ignorais.
J’ai beaucoup appris sur ce métier de pilote à l’époque bénie ou les vols n’étaient pas limités et
« corsetés » comme de nos jours. Le ciel appartenait à l’aviateur. Il suffisait d’un peu de bon sens et surtout d’expérience.
Les années cinquante à septante représente l’âge d’or de l’aviation, avec des moteurs et des instruments déjà fiables, mais qui ne donnaient pas encore « d’ordres » aux pilotes qui maîtrisaient leurs machines comme de bons chevaux qui se pilotaient « aux fesses ».
Raymond m’a encore dis avoir été privilégié en pilotant en escadrille les trois avions de légende de notre aviation : le MORANE , le VAMPIRE et le HUNTER.
Un seul regret : le MUSTANG
Au rex•oir TILO, tu nous manqueras à ton stand de « pucier », toujours disponible, toujours ouvert à la discussion, offrant le verre à l’occasion, fraternel et si proche
Mario Groppi



